[FR] Une « course de fonds » pour les start-up par C. Beigbeder

NewsPress5 October 2022

Published on the 29th September in Les Echos

La France et l’Europe ont raté les virages précédents, ceux qui ont vu naître les géants du numérique. Un nouvel échec entérinerait notre effacement économique. Il faut donc, estime Charles Beigbeder, financer massivement les start-up même si le contexte est plus difficile, notamment en orientant l’épargne disponible en direction des fonds de private equity.

Pasqal Neutral Atom Quantum Computer

Crise énergétique et climatique inédite, retour de l’inflation et resserrement de la politique monétaire : ne nous le cachons pas, après avoir montré son exceptionnelle capacité de rebond post-Covid, l’économie française va connaître des heures agitées.

Ce sera d’autant plus vrai pour nos start-up avec un fort ralentissement des financements à venir. Pourtant, c’est bien dans ces temps complexes qu’il faut agir pour préparer l’économie et les emplois de demain et retrouver notre souveraineté industrielle.

Assurément la France, et l’Europe avec elle, a raté les virages précédents, ceux qui ont vu naître les géants du numérique. Un seul chiffre pour le démontrer : aujourd’hui, près de 90 % des plus grosses valorisations boursières mondiales dans le secteur de la tech sont soit américaines soit asiatiques. Alors, pour nous Européens, un nouvel échec demain achèverait encore un peu plus notre effacement économique.

Les progrès deviennent très vite concrets

Mais d’où viendra notre sursaut ? Evidemment, il est impossible de prédire avec exactitude les technologies qui feront le futur. Le quantique, le New Space ou les green deeptechs devraient jouer un rôle majeur. Dans chacun de ces domaines, les technologies de rupture vont se multiplier ces prochaines années. Et loin d’être des gadgets, ces technologies vont modifier profondément notre quotidien et nous aider à tenir nos objectifs climatiques.

Grâce aux capacités des ordinateurs quantiques, nous allons pouvoir opérer certains calculs aujourd’hui impossibles pour réaliser, par exemple, des simulations très complexes sur les molécules. A terme, cela permettra de mettre au point de nouveaux médicaments dans des temps record.

Dans le spatial et l’aéronautique, les progrès vont aussi devenir très vite concrets : aviation décarbonée, nouveaux matériaux produits grâce à l’industrie en microgravité, géolocalisation et observation très précises de la planète avec la multiplication des petits satellites.

La croissance se heurte à un mur de financement

Sans oublier les greentechs qui permettront d’atteindre la neutralité carbone jugée impossible à technologies constantes, selon une récente étude de McKinsey. Et ici aussi, les attentes sont immenses : stockage de l’électricité, développement de l’hydrogène vert dans le transport et l’industrie, alimentation durable.

Tous ces champs d’avenir, nos start-up ont déjà commencé à les investir. Nous pourrions multiplier les exemples français, mais citons-en simplement deux : Pasqal, fondé en 2019, est aujourd’hui l’un des pionniers de l’ordinateur quantique dans le monde, quand Qubit Pharmaceuticals – à peine deux ans d’âge – a déjà mis au point des outils permettant d’estimer en quelques heures l’efficacité d’une molécule. Dans les deux cas, leurs importantes levées de fonds leur ont permis de s’imposer rapidement comme des leaders de leurs marchés respectifs.

Ces deux jeunes start-up rappellent ainsi que si l’innovation est une course, elle est surtout une course de fonds. Certes, la France dispose encore de tous les atouts pour réussir avec ses chercheurs bien formés et ses labos reconnus à l’international, mais trop souvent la croissance de nos entreprises se heurte à un mur du financement.

Orienter l’épargne vers les fonds de private equity

Pour créer à nouveau des licornes puis des géants industriels – les futures « big deeptechs » – soutenons-les dans la durée. Avec la présentation du plan France 2030 l’an dernier, l’Etat a rappelé son rôle moteur pour flécher et encourager l’investissement vers les domaines d’avenir. Et si l’on veut aller plus loin, ce sont aux fonds de private equity de prendre le relais pour aider nos jeunes pousses à se développer et faire aboutir leurs innovations de rupture. Leur bonne connaissance des écosystèmes doit justement permettre d’accélérer le développement de nos start-up, de l’early stage jusqu’à l’introduction en Bourse.

 Le moment est venu d’orienter l’épargne disponible vers ces fonds, afin de doper le financement de nos start-up. Il n’est pas trop tard pour agir. Lançons-nous dans la course à l’innovation. Une course de fonds, à fond !

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